Réunions en ligne / vidéo possibles
Contact me
Contactez-moi

Nouvelle convention fiscale franco-belge, qu’est-ce qui change ?

Publié le 2 août 2022

La Belgique et la France ont présenté, fin 2021, leur nouvelle convention fiscale préventive de double imposition. Un traité qui aura des répercussions pour vos investissements et biens immobiliers en France.

Le nouveau traité fiscal franco-belge remplace la convention de 1964 relative aux impôts directs et sur la fortune, mais pas celle de 1959 qui porte sur les successions. Cette dernière reste donc applicable jusqu’à nouvel ordre.

Modèle OCDE

L’objectif prioritaire de la renégociation du traité de 1964 était d’aligner la nouvelle convention fiscale franco-belge sur le modèle de convention de l’OCDE, pointe Grégory Homans, Managing Partner du cabinet d’avocats fiscalistes Dekeyser & Associés. “La plupart des États cherchent à conclure des conventions conformes au modèle OCDE. Cela offre de nombreuses facilités sur le plan juridique et le plan fiscal : approche uniforme sur la portée des termes, jurisprudence commune, logiques identiques, etc.”

La Belgique et la France en ont profité pour modifier certains termes de leur convention. Les deux pays se sont ainsi accordés sur un texte final présenté le 9 novembre 2021 qui ne bougera, en principe, plus d’une virgule. Mais la date de son entrée en vigueur demeure incertaine.

“Le nouveau traité fiscal entrera en vigueur le 1er janvier qui suit la ratification par le Parlement français, ainsi que par les Parlements fédérés et fédéral en Belgique”, précise Grégory Homans. À l’heure d’écrire ces lignes, une entrée en vigueur le 1er janvier 2023 demeure possible, même s’il semble plus probable que le texte ne soit ratifié qu’en 2023, repoussant l’entrée en vigueur au 1er janvier 2024.

Double précompte sur dividendes d’origine française

Cette nouvelle convention aura différentes répercussions en matière patrimoniale. Celle qui concerne sans doute le plus de résidents belges est l’imposition des dividendes d’origine française. “Le point positif est que la retenue à la source française est plafonnée à 12,8 % au lieu de maximum 15 % dans la convention de 1964. Dans les faits, la retenue est déjà aujourd’hui de 12,8 % suivant le droit fiscal interne français, mais ce plafond est désormais fixé par le traité. De son côté, la Belgique a obtenu le retrait de la quotité forfaitaire d’impôts étrangers (QFIE)”, souligne M. Homans.

Cette QFIE a fait couler beaucoup d’encre. Le fisc refusant de l’appliquer, des contribuables ont porté l’affaire devant la justice et la Cour de cassation s’est prononcée à deux reprises en leur faveur. Le fisc avait ainsi été contraint de confirmer officiellement l’imputation de la QFIE l’année dernière. Concrètement, elle permet, dans certaines conditions, aux résidents belges recevant des dividendes d’entreprises françaises de réduire le précompte dû en Belgique de 15 %.

Imaginons que vous receviez 100 euros de dividendes d’une entreprise française cette année. La retenue à la source française de 12,8 euros est tout d’abord prélevée. Le net frontière de 87,2 euros (100 – 12,8) est ensuite soumis au précompte mobilier belge ordinaire de 30 % (-26,16 euros). Mais grâce à la QFIE, vous pouvez ensuite récupérer 15 % du net frontière via votre déclaration fiscale (+13,08 euros). Au total, vous recevez donc 74,12 euros en net, soit un prélèvement global de 25,88 %, inférieur au précompte mobilier de 30 % frappant les dividendes belges…

“À la suite de la suppression de la QFIE dans la nouvelle convention franco-belge, l’imputation de la QFIE ne sera plus possible pour les dividendes versés après son entrée en vigueur”, précise Grégory Homans. Vos 100 euros de dividendes d’origine française seront ainsi soumis à la retenue à la source de 12,8 %, puis au précompte mobilier de 30 % sur le net frontière, soit un dividende net de 61,04 euros.

Concrètement, de telles plus-values seront soumises à la fiscalité française prévoyant un impôt de 19 % et un prélèvement de solidarité de 7,5 %. Il existe toutefois un système d’abattement progressif à partir de la sixième année de détention de l’immeuble. L’exonération est complète après vingt-deux ans pour l’impôt et trente ans pour le prélèvement de solidarité.

SCI translucide

Autre mauvaise nouvelle pour les propriétaires de sociétés immobilières françaises, “la nouvelle convention ne règle pas la question de l’imposition des revenus distribués par des SCI translucides de droit français au profit d’associés résidents belges”, regrette M. Homans. Rappelons qu’une SCI translucide est une société qui a la personnalité morale (juridique), mais pas fiscale, un concept qui n’existe pas en Belgique.

Ce qui n’est pas sans conséquence. “Imaginons que vous achetiez une seconde résidence en Bretagne par le biais d’une SCI et que vous décidiez de la louer quelques semaines par an. Du côté français, les loyers perçus par une telle SCI sont imposés au nom de la société, mais – suivant le principe de translucidité fiscale – il incombe aux associés de régler cet impôt. En corollaire, le versement de dividendes par la SCI en faveur de ses associés constitue un non-événement (qui est donc non imposable) en droit fiscal français. La notion de translucidité n’existant pas en droit belge, les autorités fiscales belges imposent les distributions de la SCI en faveur des associés résidents belges au taux de 30 %. Certains estiment que cette situation entraîne une double imposition, ce qui n’est pas exact comme l’a confirmé à deux reprises la Cour de cassation belge”, constate Grégory Homans.

On aurait pu espérer que la nouvelle convention clarifie ce problème, mais cela n’a pas été le cas. En conclusion, “le recours à une SCI dans le cadre de l’achat d’un immeuble français par un particulier résident belge perd de son intérêt”.

Immeuble français non donné en location

Cependant, la nouvelle convention réserve aussi une surprise à ceux détenant en nom propre une seconde résidence et qui ne la donnent pas en location.

“La Belgique avait été sanctionnée, car elle imposait les secondes résidences non louées différemment selon qu’elles se situent en Belgique ou à l’étranger”, rappelle Grégory Homans. Pour résoudre le problème, le fisc a attribué, l’année dernière un revenu cadastral (RC) pour les biens à l’étranger détenus par des résidents belges. Dans le cas d’une seconde résidence à l’étranger non louée, ce RC est fiscalement exonéré d’impôts en Belgique sous réserve de progressivité. Cela signifie qu’il en est seulement tenu compte pour déterminer le taux d’imposition des revenus soumis aux taux d’imposition progressifs.

Cependant, la nouvelle convention subordonne cette exonération sous réserve de progressivité à une nouvelle condition, à savoir le fait que le RC ait été effectivement taxé en France. “Étant donné que le RC à la belge est un concept inconnu des autorités fiscales françaises et que ce revenu n’est pas effectivement imposé en France, il pourrait à l’avenir être pleinement imposé en Belgique et non uniquement sous réserve de progressivité. Il existe des arguments pour contester cette interprétation stricte et littérale du traité. Sur la base des informations en notre possession, les autorités fiscales belges devraient prochainement adopter une instruction précisant que le RC demeure bel et bien exonéré sous réserve de progressivité”, précise M. Homans.

Chefs d’entreprise expatriés

Enfin, la France a obtenu un durcissement de la fiscalité pour ses chefs d’entreprise qui s’expatrient en Belgique. “La nouvelle convention permet à la France de taxer les plus-values réalisées par des résidents belges détenant une participation substantielle (au moins 25 % du capital ou des droits des votes détenus directement ou indirectement, seul ou avec des personnes apparentées) à quatre conditions :

L’expatrié doit avoir résidé en France pendant au moins six années au cours de la décennie qui a précédé son déménagement en Belgique ; il devait détenir la participation substantielle à quelque moment que ce soit au cours des cinq années précédant sa prise de résidence en Belgique ; la cession doit intervenir dans les sept années suivant le déménagement ; les titres cédés devaient porter sur une participation substantielle qu’il détenait quand il a quitté la France”, précise Grégory Homans.

Cette nouveauté engendrera de nombreuses questions, selon l’expert qui s’interroge notamment sur la manière dont il convient d’articuler l’exit-tax française et cette nouvelle taxation française des plus-values réalisées sur une participation substantielle.

Source : L’Éventail, le 2 août 2022

Dekeyser & Associés - L'Eventail - 2 août 2022 - Nouvelle convention fiscale franco-belge, qu'est ce qui change
Pour télécharger ou imprimer ce document PDF, veuillez cliquer sur l'icon ci-dessus
2022-09-06T12:13:31+02:0002 août 22|