Publié le 30 octobre 2020
Le Gouvernement a annoncé l’instauration d’une contribution de solidarité visant les personnes « qui ont la plus grande capacité contributive ». Cette taxe prendrait finalement la forme d’une nouvelle version de la taxe sur les comptes-titres (TCT 2.0.), dont le taux serait maintenu à 0,15%.
La taxe « corona » prendra finalement la forme d’une TCT 2.0.
Pour tenter de rencontrer les critiques émises par la Cour Constitutionnelle dans son arrêt du mois d’octobre 2019 annulant la précédente version de la TCT, le Gouvernement a pris soin de préciser notamment les éléments suivants :
- la TCT 2.0. s’activera dès que la valeur du compte-titres excède 1.000.000€ et ne s’appliquera qu’à concurrence de l’excédent (pour rappel, la précédente version de la TCT s’activait dès que la valeur du compte-titres dépassait le seuil de 500.000€ et concernait, dans ce cas, la totalité du compte-titres)
- elle visera tous les titres / instruments inscrits sur le compte-titres (certains titres / instruments étaient exclus du champ d’application de la précédente TCT)
- les sociétés seront également redevables de la TCT (seules les personnes physiques l’étaient précédemment)
- cette taxe porterait sur le compte-titres lui-même et non plus sur son ou ses titulaires (dans le cadre de la précédente version de la TCT, une pratique consistait à multiplier les titulaires du compte-titres pour sortir du champ d’application de la TCT : pratique dite des « micro-donations »).
Il n’est toutefois pas exclu que certaines caractéristiques de la TCT 2.0. puissent encore être considérées comme discriminatoires (e.a. le seuil d’activation de 1.000.000€, le fait que les titres nominatifs inscrits dans un registre d’actionnaires n’entrent pas dans le champ d’application de la TCT nouvelle version).
Par prudence, le projet de loi a été soumis à l’avis du Conseil d’Etat pour permettre au Gouvernement d’anticiper d’éventuels écueils et de revoir son texte au besoin.
Cette nouvelle TCT devrait entrer en vigueur prochainement et non plus au conclave budgétaire de mars/avril 2021 comme annoncé initialement. Il n’est par ailleurs pas exclu que cette taxe puisse éventuellement rétroagir au mois de septembre 2020. Pour rappel, une telle rétroactivité était déjà intervenue lors de l’instauration de la précédente version de la TCT.
Autre inconnue qui demeure : la TCT 2.0. est-elle une mesure structurelle ou temporaire s’inscrivant dans un contexte de crise sanitaire ?
Champ d’application de la TCT 2.0. : assurances-vie, titres nominatifs ?
La TCT 2.0. constitue une taxe d’abonnement prélevée directement par les banques sur les comptes-titres dont la valeur excède 1.000.000€. Ce seuil s’apprécie désormais par compte-titres et non plus par titulaire.
Les comptes-titres visés sont les suivants :
- les comptes-titres belges ou étrangers ouverts au nom d’un particulier résident belge
- les comptes-titres belges ou étrangers ouverts au nom d’une société établie en Belgique
- les comptes-titres belges ou étrangers ouverts au nom d’une entité non belge visée par la taxe Caïman
- les comptes-titres belges ouverts au nom d’un particulier non-résident belge
- les comptes-titres belges ouverts au nom d’une société établie à l’étranger
Aucune précision n’est donnée quant aux comptes-titres liés à une assurance-vie branche 23.
Bien qu’il y ait des arguments pour défendre l’exclusion des assurances-vie du champ d’application de la TCT 2.0., il ne peut être à ce stade exclu que les comptes-titres liés à une assurance-vie puissent être visés par la nouvelle version de la TCT.
Le Gouvernement l’avait annoncé : la contribution de solidarité devra être établie dans le respect de l’entreprenariat. Pour rencontrer cet objectif, les titres nominatifs inscrits au registre des actionnaires ont été exclus du champ d’application de la TCT 2.0.
Cette exclusion est-elle anticonstitutionnelle ? Pour rappel, la Cour Constitutionnelle avait annulé la version initiale de la TCT notamment car elle ne visait pas les titres nominatifs. Cette différence de traitement a été jugée non raisonnable et non justifiée.
Est-ce que le fait de la TCT 2.0. porte désormais sur le compte-titres et non plus sur le titulaire permettra d’éviter cette critique ? A défaut, le Gouvernement pourrait s’inspirer de la manière dont la France fonctionnait au temps de l’ISF. Cet impôt visait l’ensemble des actifs sous réserve de certaines exceptions. Parmi celles-ci : les participations dans les sociétés opérationnelles dont le contribuable détient plus de 25% et dans lesquelles il exerce des fonctions de direction, les holdings dites animatrices et, sous certaines conditions strictes, les holdings passives à concurrence de leurs participations dans des sociétés exclues du champ d’application de l’ISF.
Auteurs : Grégory Homans, associé au cabinet d’avocats Dekeyser & Associés
Wolters Kluwer 30 octobre 2020 Taxe Corona ou le retour de la Taxe sur les comptes titresPour télécharger ou imprimer ce document PDF, veuillez cliquer sur l'icon ci-dessus