Le nouveau droit successoral entrera en vigueur le 1er septembre 2018. Il s’appliquera à toutes les successions ouvertes à partir de cette date mais, également, aux donations réalisées antérieurement.
Le fait que d’ « anciennes donations » soient soumises au nouveau droit successoral est susceptible d’entrainer des situations délicates. Illustrons en certaines au moyen de cas concrets:
Prenons le cas de Jean et de ses deux fils. Jean donne, avant le 1er septembre 2018, des avoirs financiers d’une valeur globale de 500.000 € à son fils aîné. Jean donne, le même jour, les titres de l’entreprise familiale d’une valeur de 500.000 € à son fils cadet actif dans celle-ci. Jean souhaite conserver l’usufruit sur les titres de l’entreprise familiale. A son décès, la valeur de l’entreprise familiale atteint 800.000 € et ce, essentiellement grâce au travail du fils cadet. Pour Jean, l’égalité entre ses enfants a été respectée.
Si Jean décède sans autre patrimoine avant le 1er septembre 2018, sa succession sera composée de 1.000.000 € [500.000 € (avoirs financiers) + 500.000 € (titres de l’entreprise familiale)]. Chacun des enfants a déjà perçu sa part dans la succession du père.
Si Jean décède sans autre patrimoine à partir du 1er septembre 2018, sa succession sera composée de 1.300.000 € [500.000 € (avoirs financiers) + 800.000 € (titres de l’entreprise familiale valorisés au jour du décès de Jean (et non plus au jour de la donation comme c’était le cas sous l’ancien droit successoral)]. Chacun de ses fils aura droit respectivement à 650.000 €. Or, comme le frère ainé n’a reçu que 500.000 €, il sera en droit de remettre en cause la donation que son père a consentie à son frère cadet. Cela pourrait être vécu comme une injustice par ce dernier et altérer la paix familiale.
Intéressons-nous au cas de Marie et de ses deux filles âgées respectivement de 10 et 17 ans. Marie donne 100.000 € à chacune de ses filles à leurs 18 ans.
Si Marie décède avant le 1er septembre 2018, chacune de ses filles doit rapporter, dans le cadre du partage successoral, 100.000 € à la succession de Marie. Cela permettra de déterminer le patrimoine de Marie à partager entre ses deux filles.
Si Marie décède à partir du 1er septembre 2018, chacune de ses filles devra rapporter à la succession 100.000 € indexés au décès de leur mère. La fille aînée devra donc rapporter une donation indexée sur 7 années de plus. Cela entrainera un déséquilibre entre les sœurs (la fille aînée devra rapporter une somme plus importante). Cette rupture d’égalité pourrait également remettre en cause la paix familiale.
Heureusement, il est possible de s’organiser de plusieurs manières pour que les donations antérieures à l’entrée en vigueur du nouveau droit successoral demeurent régies par les anciennes règles.
L’une de ces manières consiste à faire une déclaration de maintien auprès d’un notaire. Le coût de cet acte notarié oscille en principe entre 250 € et 500 €.
Cette déclaration de maintien est globale. Cela signifie que l’ensemble des donations intervenues avant le 1er septembre 2018 demeureront soumises aux anciennes règles civiles successorales. Ce caractère global amène parfois certaines personnes à privilégier d’autres aménagements plus ponctuels, lesquels doivent être adoptés avant le 1er septembre 2018.
Vu le caractère global de la déclaration de maintien, il n’est pas obligatoire d’y lister l’ensemble des donations réalisées avant le 1er septembre 2018. Si les donations venaient toutefois à y être mentionnées, le receveur de l’enregistrement pourrait être tenté de prélever des droits d’enregistrement réduits sur les donations mobilières non enregistrées reprises dans cette déclaration. Il existe toutefois plusieurs arguments pour s’opposer à cette prétention.
La déclaration de maintien devait initialement être effectuée au plus tard le 31 août 2018. Le Législateur a finalement jugé ce délai trop court pour permettre à chaque citoyen d’examiner sa situation spécifique et pour permettre d’apprécier avec un expert en droit patrimonial l’opportunité de réaliser ou non une telle déclaration. Ce délai vient ainsi d’être prolongé jusqu’au 31 août 2019.
Analyse de Me Grégory Homans, associé au cabinet Dekeyser & Associés
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