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Moins d’impôt belge sur les placements français et italiens

Publié le 2 décembre 2020

La fiscalité sur les intérêts français bénéficiera aussi de l’arrêt sur le double précompte. Idem pour d’autres produits étrangers, tels que des actions italiennes.

Obtenir un remboursement de précompte sur vos dividendes d’actions Fiat FCA2,76% ou sur les intérêts de vos obligations Total FP2,82% ? Cela devrait être possible grâce au récent arrêt de la Cour de cassation concernant la double imposition de dividendes français perçus par des investisseurs belges. D’après plusieurs spécialistes du droit fiscal, la portée de cette décision est en effet bien plus large et devrait aussi profiter non seulement aux Belges qui possèdent d’autres types de placements français, mais aussi à ceux qui détiennent des actions de plusieurs autres pays, tels que l’Italie ou encore l’Australie.

Le 15 octobre, la Cour de cassation avait condamné l’Etat belge parce qu’il refusait que les investisseurs qui perçoivent des dividendes d’actions françaises déduisent de leur précompte mobilier belge une partie de l’impôt déjà prélevé en France. La haute juridiction a décidé que l’administration fiscale belge n’interprétait pas correctement la convention préventive de double imposition conclue entre la Belgique et la France.

Ce traité prévoit que l’impôt belge sur les revenus mobiliers français doit être diminué « de la quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE, NDLR) déductible dans les conditions fixées par la législation belge, sans que cette quotité puisse être inférieure à 15% » du montant obtenu après application de la retenue à la source française. Le fisc considérait qu’étant donné que la loi belge ne prévoit plus, depuis plusieurs années, de QFIE déductible, il n’y avait plus lieu d’appliquer cette déduction. Mais la Cour de cassation s’est quant à elle focalisée sur les termes « sans que cette quotité puisse être inférieure à 15% ». Selon la cour suprême, les contribuables belges tirent directement de ce passage de la convention le droit de déduire une partie de l’impôt français du précompte prélevé en Belgique. L’enjeu financier est important puisque cela permet de réduire la charge fiscale totale de 40,5% à 27,75%.

Obligations et assurances-vie françaises

L’affaire qui avait conduit à cet arrêt de cassation portait sur l’impôt prélevé sur des dividendes d’actions françaises. Mais il apparaît aujourd’hui que l’enseignement de la haute cour peut aussi concerner bien d’autres produits financiers, à commencer par les intérêts perçus en France sur des placements à revenu fixe, tels que des obligations, des comptes d’épargne ou des fonds de distribution (qui reversent aux titulaires des fonds les revenus des placements sous-jacents).

« La jurisprudence de la Cour de cassation signifie que le contribuable est également en droit de bénéficier du crédit d’impôt pour les revenus d’intérêts », explique Grégory Komlosi, Counsel chez Eversheds Sutherland Belgium. « La clause de la convention en question est en effet également applicable aux revenus d’intérêts. » « Bien que l’affaire soumise à la Cour de cassation concernât exclusivement le traitement fiscal des dividendes de source française, le raisonnement défendu et validé par la Cour devrait également pouvoir s’appliquer aux intérêts de source française », confirme Grégory Homans, associé gérant du cabinet Dekeyser & Associés.

Selon ce dernier, cette nouvelle donne fiscale devrait aussi bénéficier aux Belges qui détiennent des assurances-vie françaises. « Rappelons que l’administration fiscale française considère les rachats sur contrat d’assurance-vie comme des intérêts au sens de l’article 16 du traité fiscal franco-belge », souligne Me Homans. Ces rachats devraient donc aussi être moins imposés à l’avenir.

Italie, Hongrie, Australie, etc.

Mais ce n’est pas tout: cet arrêt de la Cour de cassation pourrait avoir des conséquences sur l’interprétation d’autres conventions préventives de double imposition signées par la Belgique, parce que ces traités sont calqués sur le texte franco-belge. « La jurisprudence de la Cour de cassation est possible grâce à l’énoncé très particulier de la convention franco-belge actuelle », analyse Grégory Komlosi (Eversheds Sutherland Belgium). « Or, ce même type d’énoncé est également repris dans les conventions avec l’Italie, l’Australie, Israël, la Hongrie et la Côte d’Ivoire. Les contribuables percevant des dividendes et des intérêts provenant de ces pays ont donc intérêt à examiner s’ils sont en droit de bénéficier d’un crédit d’impôt belge. »

« L’enseignement de la Cour de cassation belge en matière de QFIE dans un contexte franco-belge devrait pouvoir s’appliquer par analogie à certains autres traités fiscaux, entre autres les conventions belgo-italienne et belgo-israélienne, et ce, bien que la Cour de cassation n’ait pas statué sur ces cas spécifiques », renchérit Me Grégory Homans (Dekeyser & Associés).

Reste à voir comment, en pratique, l’administration fiscale belge réagira à l’arrêt de la Cour de cassation. Les fiscalistes pensent qu’elle n’aura pas le choix et devra se conformer à cette jurisprudence parce qu’il s’agit là du deuxième rappel à l’ordre lancé par la cour suprême. A ce stade, le service public fédéral des Finances signale que « les conséquences de l’arrêt sont toujours à l’étude auprès de l’administration ». Le ministre des Finances a quant à lui confié le dossier à ses conseillers.

Réclamation

En attendant, les investisseurs belges concernés peuvent faire valoir leurs droits en demandant un remboursement du surplus de précompte mobilier perçu par le fisc, via une réclamation pour l’année en cours, voire en introduisant une demande de dégrèvement d’office pour les cinq dernières années.

Et pour l’avenir? En ce qui concerne les revenus de placements français, la possibilité de réduire le précompte mobilier belge sera, à un moment, supprimée car la Belgique et la France ont conclu une nouvelle convention qui ne reprend plus l’énoncé sur lequel la Cour de cassation s’est fondée pour autoriser ce remboursement partiel d’impôt.

Mais encore faut-il que ce texte entre en vigueur. Or, il n’a pas encore été signé officiellement. Selon la porte-parole du SPF Finances, Florence Angelici, « la signature du traité devrait se faire aux environs du mois de janvier ou février ». Après cette signature, « les différents parlements belges devront ratifier le nouveau traité fiscal », indique Me Homans (Dekeyser & Associés). « Après cette ratification, le Roi sera amené à contresigner la loi d’approbation de ce nouveau traité fiscal. Cette loi sera ensuite publiée au Moniteur belge. Plusieurs mois ou années devraient encore s’écouler entre la signature de la nouvelle convention et son entrée en vigueur effective. » Le temps jouera donc en faveur des contribuables concernés.

Source : L’Echo

Dekeyser & Associés - L'Echo - 2 décembre 2020 - Moins d'impôt belge sur les placements français et italiens
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