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La taxation des NFT manque de cohérence

Publié le 23 janvier 2023

Source : L’Echo, le 23 janvier 2023

Dekeyser & Associés - L'Echo - 23 janvier 2023 - La taxation des NFT manque de cohérence

La taxation des NFT manque de cohérence

L’administration de l’IPP assimile le NFT à une monnaie tandis que l’administration de la TVA considère qu’il s’agit d’une œuvre d’art. D’où des traitements fiscaux différents.

Si vous décidez sur un coup de tête d’acheter le NFT de Wout Van Aert franchissant la ligne d’arrivée en vainqueur sur les Champs Élysées ou au sommet du Ventoux lors du Tour de France 2021, il vous suffira de débourser 47.000 euros.

Pour ceux qui ne savent pas, les NFT (non-fungible token ou jetons non fongibles) sont des certificats de propriété numérique. Ils attestent de la propriété d’une œuvre ou d’un objet virtuel. Comme le bitcoin, ils utilisent la technologie de la blockchain et font l’objet d’un engouement spéculatif.

Si vous disposez de moyens vraiment conséquents, vous pourriez viser la carte unique de Kylian Mbappé les bras croisés, adjugée aux enchères en mai 2022 pour 416.000 euros.

En revanche, si vous souhaitez revendre ce NFT ou que vos enfants en héritent, il faudra passer par la case du fisc. Or le traitement fiscal des NFT demeure pour l’instant relativement flou. Dans notre édition du 7 mai 2022, nous avions déjà proposé un aperçu de ce traitement fiscal. Mais entre-temps, la pratique de l’administration et le nouveau régime des droits d’auteurs ont quelque peu changé la donne.

Différence de qualification fiscale

C’est surtout la qualification fiscale du NFT donnée par l’administration qui pose question. « Il y a une asymétrie entre d’une part la qualification du NFT par l’administration de l’impôt des personnes physiques, qui considère qu’il s’agit d’une monnaie, ce qui lui convient bien, et d’autre part la qualification du NFT par l’administration de la TVA, qui assimile le NFT à une œuvre d’art et non une monnaie, ce qui l’arrange bien aussi », observe Grégory Homans, avocat, associé gérant du cabinet Dekeyser & Associés.

En effet, en considérant le NFT comme une monnaie (et non comme une œuvre d’art), l’administration des personnes physiques peut taxer la plus-value réalisée. A contrario, en assimilant le NFT à une œuvre d’art (et non à une monnaie), l’administration de la TVA peut, dans certains cas, prélever de la TVA (21%). « Cette différence de qualification semble orientée par un choix d’opportunité fiscale. Elle est notamment autorisée par l’absence de cadre juridique et fiscal spécifique aux NFT. Cette asymétrie interroge la cohérence du système proposé par les autorités fiscales », estime Grégory Homans.

Plus-values et réforme des droits d’auteurs

Si on devait considérer le NFT comme une œuvre d’art, une partie du prix de vente du NFT pourrait en principe bénéficier du régime fiscal favorable des droits d’auteurs. L’intérêt de cette qualification doit toutefois désormais être tempéré, selon Grégory Homans. Car entre-temps le régime des droits d’auteurs a été revu. « Depuis le 1er janvier 2023, le champ d’application de ce régime favorable a été significativement limité. Par exemple, seul l’auteur (et ses héritiers ou légataires) est éligible au régime favorable des droits d’auteur. Autrement dit, pour pouvoir bénéficier du régime des droits d’auteurs, le vendeur du NFT doit être l’auteur originel. »

Si par contre, le NFT est considéré comme une crypto-monnaie (à l’instar du bitcoin), le particulier vendeur sera, selon les spécificités de sa situation, soit totalement exonéré d’impôt sur la plus-value réalisée s’il a investi en bon père de famille, soit taxé à titre de revenus divers sur cette plus-value (taux fixe de 33%) s’il a investi dans un objectif spéculatif, soit taxé à titre de revenus professionnels (taux progressif allant jusque 50%) s’il est un investisseur professionnel.

Successions: prudence

Enfin, en matière de successions, Me Homans conseille la prudence et la transparence. « Comme il s’agit d’un actif virtuel, certains pourraient être tentés de ne pas les reprendre dans la déclaration de succession. Mais ce serait oublier l’intensification des échanges d’informations en matière de crypto-actifs. Les autorités fiscales disposent de plus en plus d’informations relatives à ces actifs virtuels. En temps de crise, elles y prêtent une attention soutenue. »

D’autant qu’une directive européenne (« DAC 8 ») intensifiant encore les échanges automatiques d’informations entre les autorités fiscales en matière d’actifs numériques (dont les NFT) devrait prochainement entrer en vigueur. Cette directive s’inscrit dans le Cadre Déclaratif Applicable aux Crypto-actifs (CARF) publié par l’OCDE le 10 octobre 2022.

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