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Ecologie, règlements, impôts sur les plus-values… ce qui fait trembler les cryptomonnaies au lobbying agressif

Comment apporter de la transparence et de la clarté dans un marché très opaque ?

Publié le 3 avril 2022

Apporter de la transparence et de la clarté dans un marché très opaque. Tel est l’objectif principal du règlement MiCa ( Market in crypto assets ) qui a été voté il y a une dizaine de jours en commission Économie du Parlement européen. À l’occasion de ce vote, les députés européens ont fait trembler la planète bitcoin. Car un amendement avait été déposé en dernière minute visant à interdire le processus technologique de validation des transactions en bitcoin (le minage), en raison de son impact environnemental, jugé désastreux. Cet amendement a finalement été rejeté de justesse. Ce qui « satisfait » Hervé Bonazzi, CEO d’Archipels, une structure issue du rapprochement de plusieurs sociétés dont EDF et Engie. « Il n’était pas positif d’inclure des éléments technologiques liés à des considérations écologiques. Cela comportait le risque de fermer la porte à une forme d’innovation, à l’accès à de nouvelles infrastructures comme la blockchain. »

Tests de compétence

Le règlement qui doit entrer en vigueur au plus tard en 2024 « s’attache à définir ce que sont les crypto-actifs et les prestataires de services sur crypto-actifs. Il s’agit d’une première étape essentielle à un encadrement efficace de ces activités. Surtout, ce texte prévoit des exigences nouvelles imposées aux émetteurs de crypto-actifs et aux prestataires de services sur crypto-actifs, afin de mieux protéger les consommateurs.

Parmi ces avancées, l’obligation faite aux prestataires de services d’obtenir un agrément et de soumettre leurs cadres supérieurs à des tests de compétence et d’honorabilité. Il s’agit ici en somme de protéger les consommateurs. Tout comme il y a des règles dans la banque et la finance, il doit y avoir des règles côté cryptos » , explique la socialiste française et parlementaire européenne Aurore Lalucq. En Belgique, c’est la FSMA qui est chargée de délivrer ces agréments.

Registre public

Un autre texte à l’agenda jeudi dernier au Parlement européen a aussi suscité, selon Aurore Lalucq, un lobbying parfois « virulent et agressif » des milieux pro-cryptos qui y voient une atteinte à la liberté des utilisateurs. Proposé par le groupe de l’Alliance Progressiste des Socialistes et des Démocrates, il consiste à réviser la directive autour des transferts de fonds dans le cadre de la lutte contre le blanchiment afin d’intégrer les cryptos. Il comporte trois grands objets. Un : le seuil passe à 0 euro (contre 1 000 euros actuellement) pour l’identification des transactions. Deux : établir un registre public des cryptocompagnies qui ne suivraient pas les règles. Trois : établir une signalisation automatique aux autorités compétentes de tout transfert supérieur à 1 000 euros venant d’un unhosted wallet (portefeuille non hébergé, par exemple, dans une plateforme d’échange). « Il faut mettre fin à l’anonymat dans le milieu des cryptos qui nourrit trop souvent des pratiques comme le blanchiment d’argent ou le financement d’activités illégales », souligne Aurore Lelucq.

Sans nier la nécessité d’une régulation, Hervé Bonazzi estime que « les régulateurs vont trop loin » car ils risquent de « mettre l’Europe à l’écart notamment par rapport aux États- Unis qui se montrent plus ouverts « .

Aurore Lalucq rétorque qu' »il s’agit seulement de s’identifier, de la même manière que quand on s’identifie lorsque l’on effectue un transfert via sa banque. Comment comprendre ces polémiques alors que notre objectif est de lutter contre le financement du terrorisme, de la pédocriminalité, contre le blanchiment d’argent ? S’il s’agit effectivement d’investir, montrer sa carte d’identité ne devrait pas être un problème. »

Quel impôt sur les plus-values sur cryptomonnaies ?

Les cryptomonnaies sont encore un sujet relativement neuf, du point de vue du législateur. Le cadre fiscal qui entoure ces actifs numériques évolue donc en fonction de la connaissance que l’on en a. En mai 2018, alors qu’auparavant les cryptos étaient d’office considérées par le fisc comme un produit spéculatif, l’administration a modifié son point de vue au travers de plusieurs décisions anticipées (rulings) et a publié une liste de 17 questions permettant aux particuliers de savoir si leur comportement relevait ou non de la spéculation. Par exemple, en soumettant au Service des décisions anticipées (SDA) le questionnaire complété. Pour Maître Grégory Homans, associé gérant du cabinet d’avocats fiscalistes Dekeyser et associés, a priori, « les plus-values réalisées dans le cadre d’opérations de gestion normale d’un patrimoine privé ne doivent pas être déclarées. Elles sont exonérées d’impôt, comme l’a confirmé la Cour constitutionnelle, dans un arrêt du 24 février dernier ».

Spéculation taxée à 33 % ? Pour le particulier, la question de la taxation ne se pose donc que si son mode de gestion des cryptos sort du modèle dit « du bon père de famille », récemment rebaptisé « personne prudente et raisonnable ». Si tout ou partie des bénéfices réalisés suite à la conversion d’une crypto en devises classiques ou en d’autres cryptos est considéré comme relevant de la spéculation, la plus-value doit être déclarée au titre de « revenus divers » et sera taxée à hauteur de 33 %. Un professionnel verra pour sa part ses bénéfices taxés aux taux progressifs, et soumis aux cotisations sociales.

L’information circule. Maître Homans note que ces opérations ont lieu sur des sites souvent étrangers, ce qui peut amener le contribuable à négliger ses devoirs. « Mais si vous faites atterrir un pactole lié aux opérations sur cryptomonnaies sur votre compte en banque, cette dernière devra savoir d’où il provient, en vertu des lois antiblanchiment. Il faut donc disposer de toutes les traces relatives à ces opérations pour pouvoir justifier la provenance de l’argent. » Sachant qu’une directive européenne (DAC 8) va faire entrer les cryptos dans le champ des échanges automatiques de données entre États membres. Enfin, Maître Homans rappelle que les portefeuilles numériques sont soumis aux droits de succession, et peuvent aussi faire l’objet de donations.

Source :  La Libre Eco, 3 avril 2022

Dekeyser & Associés - La Libre Eco - 3 avril 2022 - Ecologie, règlements, impôts sur les plus-values..

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