Publié le 4 novembre 2017
Acheter un bien immobilier entre amis pour augmenter sa force de frappe financière et éventuellement répartir son risque sur plusieurs immeubles est une idée qui a du sens. Encore faut-il savoir sous quelle forme les intérêts des copropriétaires seront le mieux garantis.
Investir tout seul ou en couple dans l’immobilier n’est pas à portée de toutes les bourses. Les candidats à l’investissement qui désirent tout de même placer leur argent dans la brique peuvent dès lors décider de se regrouper, en famille ou entre amis, pour augmenter leur « force de frappe » financière. Mais mieux vaut choisir une bonne structure pour loger votre investissement… Il n’en existe pas 30.000. Vous serez soit copropriétaires d’un bien en indivision, soit associé d’une société créée pour y loger votre immeuble.
La société
Pour le notaire Olivier de Clippele, il ne s’agit pas de la manière la plus simple d’investir. « Avec une société, vous êtes taxé sur les loyers réels, vous devez rendre des procès-verbaux, payer un comptable, des cotisations de sécurité sociale, des frais de dépôt de bilan à la Banque nationale de Belgique, etc. ». Son confrère Gaëtan Bleeckx insiste sur le fait qu’il est aussi très compliqué de « sortir » de l’investissement, parce qu’il faut trouver un acheteur prêt à racheter une part de société. Or les autres associés n’auront peut-être ni l’envie, ni les moyens de passer la caisse.
À noter que l’idée d’une société immobilière peut être séduisante de prime abord (par exemple, en termes de simplicité de gestion). « Par contre, sur le plan fiscal, le recours à une société pour investir dans l’immobilier résidentiel est déconseillé. Si la taxation des loyers réels est certes compensée par les amortissements, ceux-ci ne durent qu’un temps. Les plus-values réalisées par la société lors de la vente de l’immeuble par la société de l’immeuble sont taxées (alors qu’elles peuvent être exonérées d’impôt en cas de vente par une personne physique). Si les actionnaires souhaitent vendre les titres de la société immobilière, une décote correspondante à la latence fiscale s’appliquera généralement sur le prix de vente de la participation », poursuit de son côté Grégory Homans, avocat spécialisé en fiscalité chez Dekeyser & Associés.
L’indivision
Au vu de ces complications, il semble qu’un achat en nom propre et en indivision soit le plus indiqué. « Cela fonctionne très bien. Tout le monde est propriétaire de chaque brique et chacun fait son emprunt de son côté », explique Olivier de Clippele. Pour une sécurité maximale, il faut que les copropriétaires signent une convention d’indivision sous seing privé. « Dans cette convention, on indique la part des revenus immobiliers qui sera réservée pour les réparations, le paiement du précompte immobilier, etc. On indique sur quel compte commun seront versés les revenus, on détermine s’il y a – ou pas – un droit de préemption au cas où un copropriétaire veut revendre sa part. On peut également convenir que l’indivision devra être maintenue pendant cinq ans (renouvelable), etc. Comme on peut aussi préciser qu’aucun copropriétaire ne peut s’adresser directement seul à un locataire », précise-t-il.
S’il n’y a pas de pacte d’indivision mentionnant une durée minimum ou si celle-ci est terminée, sortir d’indivision est plus facile que sortir d’une société, car nul n’est tenu de rester en indivision. Cela signifie que chaque copropriétaire peut exiger de recevoir sa part et peut donc forcer la vente de l’immeuble. « Soit il y a un accord et quelqu’un rachète la part en question, soit on procède à une sortie judiciaire », explique Gaëtan Bleecks. L’immeuble est donc vendu en vente publique.
L’indivision structurée
Autre possibilité: la société de droit commun immobilière (ou société civile immobilière). « Cette société n’a pas la personnalité juridique. Elle constitue en quelque sorte une indivision structurée. Les statuts de la société sont le socle de l’indivision. Les investisseurs pourraient ainsi constituer une société de droit commun belge et y apporter les fonds requis pour permettre à la société d’ensuite acquérir l’immeuble résidentiel de leur choix », explique Grégory Homans.
Il faut distinguer trois étapes dans la vie de la société.
- L’achat du bien immobilier par la société. « Lors de cette acquisition, les droits d’enregistrement ordinaires (10% ou 12,5%) sont dus », précise-t-il.
- La vente des parts de la société. « Si l’un des associés vend sa participation à un autre associé, le droit de partage de (1% ou 2,5%) sera dû. Par contre, si l’un des associés vend ses titres de société de droit commun immobilière à un tiers, les droits de vente ordinaire seront dus », poursuit Me Homans.
- La dissolution de la société. « Si la liquidation de la société n’entraîne pas un partage de l’immeuble entre associés, aucun droit d’enregistrement pourrait n’être dû. Dans le cas contraire, des droits d’enregistrement seront dus ».
Mais quel est l’avantage par rapport à une indivision « classique »? Cette structure facilite la gestion au quotidien, parce que les associés peuvent désigner un gérant pour les représenter. « Il est possible d’aboutir à un résultat quasiment similaire via une convention d’indivision correctement établie », reconnaît Grégory Homans. « Le recours à une société de droit commun peut être conseillé pour les personnes qui souhaitent se rassembler, acquérir ensemble un immeuble, le conserver et, le cas échéant, le vendre ensemble à un tiers. Par contre, le recours à ce véhicule n’est a priori pas opportun sur le plan fiscal pour des personnes qui envisagent d’ouvrir l’actionnariat de la société immobilière à des tiers investisseurs » conclut-il.
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