Publié le 19 février 2022
La Saint-Valentin vous a rappelé l’importance de votre conjoint ? Tour d’horizon des principales techniques pour le protéger sur le plan successoral.
1. Usufruit continué
Le nouveau droit successoral a inséré le concept d’usufruit continué. Prenons le cas de Marc et Marie, mariés avec deux enfants. Marc donne de l’argent à ses enfants en conservant, sa vie durant, le droit à la gestion et aux revenus sur cette somme (droit d’usufruit). À son décès, Marie continue de plein droit l’usufruit que son époux s’est réservé. L’usufruit continué est un usufruit légal. Le conjoint survivant ne bénéficiera ainsi pas d’éventuelles modalités particulières d’exercice de l’usufruit prévues entre les parties dans l’acte de donation. Enfin, l’usufruit continué par le conjoint n’est taxable qu’en Flandre.
2. Accroissement légal de l’usufruit
La réforme du droit des biens du 1er septembre 2021 a introduit la notion d’accroissement légal de l’usufruit. Imaginons que Marc et Marie décident de donner, ensemble cette fois, une somme d’argent à leurs deux enfants en se réservant l’usufruit. Au décès de l’un d’eux, le conjoint survivant recueillera automatiquement l’usufruit que l’autre s’était réservé sur la moitié de la somme.
À la différence de l’usufruit continué, l’accroissement légal ne s’applique pas uniquement entre époux (et dans une certaine mesure entre cohabitants légaux), mais profite à toute personne qui donne un bien commun ou indivis. Comme il s’agit cette fois d’un usufruit conventionnel (et non légal), le conjoint survivant pourra bénéficier des modalités spécifiques prévues dans la donation. Enfin, l’accroissement de l’usufruit a l’avantage d’être exonéré d’impôt dans les trois Régions.
3. Usufruit continué vs accroissement légal
Il se peut que ces deux mécanismes trouvent à s’appliquer simultanément. C’est le cas lorsque des époux donnent un bien commun (ou indivis) à leurs enfants en s’en réservant l’usufruit. Dans cette situation, l’usufruit continué primera l’accroissement légal, et ce, avec les éventuelles conséquences civiles et fiscales défavorables citées plus haut qui peuvent en découler. Des alternatives existent heureusement pour sécuriser le conjoint survivant à cet égard.
4. Contrat de mariage
Les personnes mariées peuvent également protéger leur conjoint en rédigeant ou en modifiant leur contrat de mariage. Imaginons que Marc dispose d’un patrimoine propre important. Il pourrait décider d’apporter tout ou partie de celui-ci dans une « bulle de communauté » créée avec Marie. Cette technique, simple et peu coûteuse, permet à Marie de devenir pleine propriétaire de la moitié du d(es) bien(s) apporté(s). Au décès de Marc, cette moitié sera exonérée de droits de succession. Cet apport peut être complété par une clause d’attribution optionnelle du patrimoine commun. Le conjoint survivant peut alors choisir les biens de la part de l’autre dans le patrimoine commun qu’il souhaite conserver ou laisser à la génération suivante.
Enfin, les couples mariés en séparation de biens peuvent insérer dans leur contrat de mariage une clause de participation aux acquêts. Concrètement, pendant le mariage, les patrimoines restent séparés. Par contre, en cas de décès ou de divorce, les revenus constitués pendant le mariage sont additionnés et partagés entre les époux.
5. Assurance-vie
De nombreux époux s’appuient sur un contrat d’assurance-vie pour sécuriser le conjoint. Imaginons que Marc et Marie aient souscrit ensemble un tel contrat prévoyant, qu’au décès du dernier d’entre eux, l’assurance se dénoue au profit de leurs deux enfants. Au premier décès, le conjoint survivant devient l’unique titulaire de l’assurance. Il peut ainsi prélever les sommes capitalisées dans le contrat. Le traitement fiscal de cet « enrichissement » du conjoint survivant a récemment évolué en Wallonie. La Région de Bruxelles-Capitale a déjà annoncé lui emboîter le pas. Suite à ces évolutions, il convient de s’assurer que les polices déjà souscrites par les époux rencontrent toujours les objectifs initialement poursuivis.
6. Testament ou donation
Le conjoint survivant a droit à une part prédéfinie dans le patrimoine de son époux prédécédé. Rien n’empêche toutefois les époux d’attribuer à leur conjoint, par un testament et dans certaines limites, une part plus importante.
Une donation entre époux permet également d’atteindre cet objectif. Sauf exception, une telle donation est toujours révocable. Si elle porte sur des biens mobiliers (comme de l’argent ou un portefeuille-titres), elle peut être totalement exonérée d’impôt si le donateur ne décède pas dans les trois ans. En Wallonie, ce délai est passé à cinq ans, et ce, pour toutes les donations consenties à partir du 1er janvier 2022.
Si le droit successoral fait déjà du conjoint un héritier protégé, les évolutions législatives récentes ainsi qu’une certaine créativité permettent de renforcer encore significativement cette protection. Un conseil judicieux et personnalisé permettra de déterminer la manière optimale de protéger son conjoint.
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