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Tout ce qu’il est possible de prévoir via l’e-planification successorale

Publié le 15 avril 2020

Même en période de confinement, il est possible de prévoir et d’ajuster votre planification successorale… à distance. Suggestions et mode d’emploi.

La crise sanitaire et le confinement nous exposent à des réflexions auxquelles nous n’aurions sans doute pas cédé en temps normal. Cloîtrés à domicile, nous nous retrouvons face à nous-même avec une intensité rarement égalée. Le contexte nous amène à réfléchir au sens de la vie et à côtoyer de plus près l’hypothèse ainsi que les conséquences d’un décès. L’occasion d’envisager plus concrètement l’opportunité de songer à sa planification successorale ou d’y apporter quelques nuances et modifications. Des professionnels nous ont effectivement fait part d’un afflux de questions et de demandes en ce sens.

Le contexte pousse à la réflexion

« Le contexte amène évidemment les gens à réfléchir. Ils ont aussi plus de temps que d’habitude pour se pencher sur toutes ces questions », cadre le notaire Renaud Grégoire. « Cette période de confinement suscite toute une série de réflexions dans l’esprit des gens. Je reçois de nombreuses demandes à ce sujet », alerte Grégory Homans, avocat spécialisé en planification patrimoniale. « Nous sommes sollicités tous azimuts. La période est difficile à gérer », confie Nicolas Cellières, planificateur financier et fondateur d’Optivy.

« La plupart des questions portent sur des questions familiales. Les gens veulent connaître les options qui s’offrent à eux et obtenir une réponse immédiate, indique Renaud Grégoire. Essentiellement pour modifier leur contrat de mariage ou leur testament. » « Des personnes qui avaient initié un projet de testament mais l’avaient mis en veilleuse sans passer à l’action et qui, aujourd’hui, souhaitent le finaliser. Mais aussi des couples désireux de boucler leur contrat de mariage et de maintenir la cérémonie civile, quitte à organiser une fête ultérieurement… » Le mariage est effectivement le mode de conjugalité qui assure le mieux la protection du conjoint survivant.

« Des clients reprennent le contact et rouvrent leurs dossiers. Les choses sont très floues dans leur esprit: ils ont oublié ce que prévoit leur contrat de mariage, perdu de vue l’existence d’une clause spécifique, ou encore s’aperçoivent que le testament qu’ils avaient déjà fait n’est plus vraiment d’actualité… C’est le moment idéal pour rassembler ses documents et faire un ‘update’ pour redéfinir les bases d’une stratégie et d’une planification que l’on pourra mettre en œuvre le jour venu », souligne pour sa part Corentin Minne, cofondateur de Pareto Financial planning. D’autant que les professionnels ont plus de temps à consacrer à leurs clients. Lesquels « découvrent la souplesse et la proactivité des rendez-vous ‘digitaux’, mais également des outils qui leur permettent de faire une série de choses depuis leur PC », ajoute Corentin Minne.

Passer à l’action, malgré le confinement

Si la période est propice à la réflexion, lorsqu’il s’agit de passer à l’action, pour l’instant, c’est une autre histoire. Les notaires ne traitent en effet plus que les actes urgents (à ce stade, jusqu’au 19 avril). Les contrats de mariage, les actes de donation, les testaments notariés, les actes de société, les actes de vente, de crédit sont tous postposés.

Une solution vient toutefois d’être trouvée par le ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V), grâce à laquelle, dès qu’une nouvelle loi en ce sens aura été votée au parlement (d’ici deux semaines), les citoyens ne seront plus obligés de se rendre physiquement chez le notaire pour passer la plupart des actes notariés (acte de vente, donation, contrat de mariage…). Il sera en effet possible de donner une procuration digitale à une personne de confiance ou à un collaborateur du notaire pour lui permettre de signer l’acte à votre place.

Grégory Homans, avocat associé au cabinet Dekeyser & Associés, saisit l’occasion de rappeler qu’il est parfaitement possible de réaliser soi-même, depuis son domicile, une série d’opérations qui permettent d’ajuster sa planification et ne nécessitent d’ailleurs pas l’intervention d’un notaire. Échantillon.

Faire donation de biens mobiliers

En cette période de confinement, il est toujours possible de faire donation de biens mobiliers (avoirs financiers, œuvres d’art, bijoux, cash, etc.). Comme son nom l’indique, seule la donation notariée nécessite l’intervention d’un notaire et ne peut donc théoriquement pas être réalisée actuellement sauf « cas urgent ». Pour ce qui est des autres formes de donation, voici la façon de procéder.

La donation manuelle. C’est la solution la plus simple: vous faites donation de la main à la main d’une sculpture ou d’une somme d’argent, par exemple. Ensuite, vous procédez à un échange de documents (pacte adjoint) entre le donateur et la personne gratifiée, confirmant pour l’un la remise du bien et pour l’autre sa réception.

La donation indirecte. Concrètement, il s’agit d’un simple un transfert de liquidités ou d’un portefeuille-titres du compte du donateur au compte du bénéficiaire. Cela peut se faire par virement via votre app bancaire ou homebanking. Vous constaterez ultérieurement que ce transfert a été réalisé à titre de donation, de la même façon que pour une donation manuelle. L’intervention d’un notaire n’est pas requise. « Un avocat peut établir ce contrat qui sera ensuite signé par les parties, à leur domicile », explique Me Grégory Homans.

La donation déguisée. « L’exemple type est celui de la vente d’un bien mobilier. Le donateur ‘vend’ le bien à ses enfants et leur remet ensuite une quittance du prix (ou une remise de dette), alors que le montant dû ne lui a en réalité pas été payé… Il est prudent d’accompagner cette quittance d’un document confirmant la donation », conseille Me Homans.

Le pacte adjoint peut prendre la forme d’un acte sous seing privé. « Généralement établi par un conseiller spécialisé et non par un notaire, ce document peut également reprendre les conditions et modalités de la donation qui visent à sécuriser le donateur ou son conjoint survivant: droit de retour conventionnel, charge de rente, prise en charge de frais (paramédicaux) ou encore interdiction de cession, précise l’avocat. Si la donation est correctement aménagée, donner ne signifie plus se dépouiller. »

Par contre, si le donateur souhaite se réserver un usufruit, Me Gregory Homans indique que « la prudence recommande dans ce cas de recourir à la formalité d’un acte notarié ».

Enregistrer une donation (a posteriori)

Pour rappel, les donations notariées (qui ne sont pas possibles actuellement, sauf cas urgent) sont enregistrées et impliquent dès lors d’office le paiement de droits d’enregistrement.

Dans les autres cas, des droits de donation ne seront dus que si l’acte sous seing privé constatant la donation est volontairement présenté à l’enregistrement. Le cas échéant, l’enregistrement donnera lieu au paiement de droits de donation compris entre 3% et 7%, selon le lien de parenté et la Région de résidence du donateur.

3 à 7 %

L’enregistrement d’une donation (qui peut également se faire a posteriori) donnera lieu au paiement de droits de donation compris entre 3% et 7%, selon le lien de parenté et la Région de résidence du donateur.

 

À défaut, aucun droit de donation ne devra être payé. En revanche, des droits de succession seront dus en cas de décès du donateur dans les 3 ans qui suivent la donation (NDLR, 4 ans en Flandre: la décision a été prise, mais la date d’entrée en vigueur du changement n’est pas encore connue). Or, les droits de succession sont progressifs (par tranches), et bien plus élevés que les droits de donation. En ligne directe (lorsque les enfants, le conjoint ou dans certains cas le cohabitant héritent) ils peuvent atteindre jusqu’à 30% et même jusqu’à 80% dans les autres cas.

Une donation peut être présentée à l’enregistrement a posteriori à n’importe quel moment! Vous pouvez le faire de chez vous. Pour ce faire, envoyez le document de confirmation de votre donation par mail à un bureau de l’enregistrement et, parallèlement, envoyez les exemplaires originaux dûment signés par les parties concernées, par courrier recommandé au bureau de l’enregistrement compétent et cliquez sur « Enregistrement » puis « Enregistrer des actes ».

En Région bruxelloise et en Région wallonne, les droits de donation doivent être payés préalablement à l’enregistrement, et la preuve de paiement ajoutée aux documents envoyés par mail.

En Région flamande, le receveur enregistrera la donation et vous recevrez ensuite un avertissement extrait de rôle vous invitant à payer les droits de donation. Notez qu’en cas de décès, c’est la date de l’enregistrement qui est prise en compte, pas celle à laquelle les droits de donation ont été payés.

Bon timing pour enregistrer une donation de titres?

« Vu le contexte et les cours actuels, l’enregistrement d’une donation de titres peut se révéler très intéressante, glisse Grégory Homans. Imaginons par exemple que vous ayez fait donation de titres cotés en Bourse dont la valeur, lors de la donation, était de 130 euros et qu’elle est aujourd’hui tombée à 35 euros… »

« Il n’est pas exclu, poursuit-il, que l’enregistrement de la donation se réalise sur base de la valeur des titres au moment de l’enregistrement (35 €) et non lors de la donation. Nous avons développé plusieurs arguments en ce sens. Cet enregistrement sur base d’une valeur ‘réduite’ permettra d’éviter tout droit de donation et tout impôt successoral sur la prise de valeur des titres consécutifs à leur enregistrement (rebond boursier) », précise l’avocat.

 

Signalons enfin qu’il est possible de s’assurer contre le risque d’un décès prématuré en souscrivant une police spécifique.

Contracter une assurance-vie en ligne

L’assurance-vie constitue une véritable alternative à la donation dans la mesure où le souscripteur dispose d’énormément de souplesse pour organiser sa planification tout en conservant jusqu’à son décès le droit de disposer librement des biens qu’il transmet et des revenus qu’ils produisent.

Selon la façon dont elle est aménagée, la police peut en effet prévoir qu’à son dénouement, le bénéficiaire touche l’intégralité des capitaux assurés en totale exonération d’impôt. « L’assurance-vie permet également d’accroître la rentabilité d’un portefeuille-titres en diminuant significativement la fiscalité des avoirs logés dans la police (précompte mobilier, TOB, taxe Reynders) », rappelle l’avocat spécialisé en planification patrimoniale. 

« L’assurance-vie étant à la croisée du droit civil, du droit fiscal et de certaines lois spécifiques, un usage inadéquat de cet outil peut être préjudiciable, tant sur le plan civil que sur le plan fiscal. Il convient ainsi d’être particulièrement vigilant », met-il toutefois en garde.

Rédiger un testament

Le testament olographe, celui que vous rédigez vous-même, est très simple à rédiger mais doit néanmoins répondre à une série de conditions pour être valable: il doit être écrit de votre main (pas dactylographié), sur une feuille totalement vierge (pas d’en-tête ni de logo), en un seul exemplaire, daté et signé par le testateur, puis rangé à un endroit où il peut être facilement retrouvé par qui de droit.

Le testament est un outil très flexible car il permet de déroger à la dévolution légale, c’est-à-dire aux règles par défaut qui s’appliqueront si vous n’avez exprimé aucune volonté particulière pour la répartition de votre héritage. Vous devrez toutefois respecter la réserve héréditaire de vos enfants qui, quel que soit leur nombre, est fixée à 50% de votre patrimoine (qui seront répartis de façon égale entre eux).

Si vous voulez être sûr de ne commettre aucune erreur, les notaires indiquent qu’ils peuvent rédiger un texte conforme à la loi qu’ils remettront ensuite au testateur avec des

instructions à suivre. Vous rédigerez ensuite le texte vous-même, à la main, vous le signerez et vous le renverrez au notaire qui se chargera de l’enregistrement. Une formalité bien utile car elle permet de retracer le document au moment du décès.

« Le testament permet d’anticiper une série de problèmes pratiques en cas de décès inopiné, ajoute Me Homans, rappelant au passage que « certains droits étrangers ne connaissent pas le concept de réserve héréditaire ou le conçoivent de façon plus restrictive, ce qui offre des perspectives intéressantes ».

Source : L’Echo

Tout ce qu'il est possible de prévoir via l'e-planification successorale
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